«La transformation digitale entre en phase 2»
By Yves MEISTERMANN | décembre 2nd, 2016 | Category: Formation informatique, News | Commentaires fermés sur «La transformation digitale entre en phase 2»Patrick Hoffstetter, l’ex-chief digital officer de Renault, pointe les difficultés d’exécution des programmes de transformation numérique.
Des nouvelles de Patrick Hoffstetter. L’ex-chief digital officer (CDO) de Renault se donne jusqu’à la fin de l’année pour déterminer la suite de sa carrière. Il a quitté son poste, en octobre dernier, après un été marqué par une valse des CDO dans de nombreuses autres entreprises . L’éventail des possibilités est large. Start-up, fonds d’investissement et grands comptes l’intéressent. Dans l’entre-deux, il se fait consultant en transformation numérique sous l’ombrelle de sa société Newmedia360. Cette quatrième voie ne lui déplaît pas non plus.
Patrick Hoffstetter partage aussi son expérience sous forme de livre. Début novembre, Nicolas Riou, le président de la société d’étude marketing Brain Value, a publié « Le Consommateur digital », aux éditions Eyrolles, rédigé avec la participation du cofondateur de l’eG10. Ce club des directeurs du numérique des grandes entreprises françaises s’est d’ailleurs réuni récemment pour un déjeuner. La discussion a rapidement abordé les défis de la deuxième phase de la transformation numérique. Entretien.
Cet été, de nombreuses sociétés ont changé de directeur du numérique. Pour vous, ces réorganisations sont-elles la conséquence du passage à une deuxième phase de la transformation numérique ?
Patrick Hoffstetter : Des années 2000 à 2016, la plupart des grandes entreprises françaises ont découvert le numérique. Désormais, elles passent à l’exécution à grande échelle. Elles ont pris conscience que la transformation numérique de l’économie allait les changer aussi. Les premiers « chief digital officers » (CDO) qu’elles avaient nommés ne sont pas pour rien dans cet éveil. Cela ne veut pas dire que tout le monde a compris le sujet mais plus personne l’ignore . Le travail de pédagogie des CDO, entre autres, a payé. La plupart d’entre eux ont aussi élaboré un projet stratégique ainsi qu’un plan d’actions. Beaucoup d’entreprises se sont arrêtées là. Mais certaines commencent à mettre en œuvre leurs plans. Pour elles, la phase 2 de la transformation numérique commence. Mais, elle n’est pas simple.
Dans cette deuxième étape, à quelles difficultés devrait être confronté le directeur du numérique ?
P.H : En commençant l’exécution, les CDO se heurtent parfois à des problèmes de gouvernance et, pour être clair, de politique interne. Surtout, ils réalisent qu’ils manquent de ressources . C’est à la fois une question de quantité que de qualité. Certaines entreprises manquent de certains profils, notamment de développeurs. A cela, s’ajoute le fait qu’elles doivent s’appuyer sur des systèmes d’information devenus préhistoriques. Parfois, ce n’est pas la faute des DSI car il leur est souvent demandé, depuis des années, de réduire leurs coûts de 5% tous les ans.
Quels sont les problèmes informatiques qui se posent ?
P.H : Il faut, par exemple, adapter le système au cloud computing (la location de serveurs informatiques à distance, ndlr). Quand l’exécution commence, le CDO devient un second DSI. Il se fait happer par des problématiques informatiques pour lesquelles il n’a ni l’expertise ni le temps. Le CDO Shiva , à quatre bras, c’était possible il y a cinq ans. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Quand la phase d’exécution est lancée, le directeur du numérique n’a plus le temps de tout régler à la fois : les problèmes d’informatique, la sensibilisation des dirigeants et de l’interne, la préparation de la stratégie numérique de l’entreprise et ses modèles économiques pour demain.
Quand l’entreprise se met en branle, quel devrait être le rôle du directeur du numérique ?
P.H : Les CDO devraient se focaliser sur les sujets de change management et les questions stratégiques. Le CDO est davantage un patron de la stratégie bis qu’un second DSI. Certaines entreprises l’ont compris et chargent un autre membre du comité exécutif – souvent un opérationnel – de superviser l’exécution. Déchargé de ce rôle, le CDO peut alors préparer la suite. L’un de ses gros enjeux est de dédiaboliser le numérique. Il faut arrêter de vouloir construire une forteresse contre les maux du numérique, il faut, au contraire,se tenir prêt à aller vers des territoires inconnus, construire de nouveaux modèles économiques et saisir les opportunités. Mais pour convaincre tout le monde, le CDO a besoin de l’oreille du PDG, qui définit le cap et crée la dynamique. Le problème est qu’il n’y a pas encore beaucoup de grands dirigeants prêts à abandonner la posture défensive et à changer la culture du retour sur investissement à 5 ans.
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